La nuit de son blason scelle et clos en nos cœurs ces temps

miraculeux où les mots avaient cours de peser sur les choses...

Livrés aux serres et aux crocs d'étranges démons et d'anges plus

félons que dévots, de noires fantaisies dansent et vivent sous nos

crânes et se jouent d'une raison reléguée aux rayons des choses

inutiles.

De grotesques équipages tout harnachés de cuir et tirés par des

bêtes folles d'ivresse et de joie partent et fendent les brumes

du songe indécis.

De quels habits se vêtent nos rêves et de quel bois sont fabriqués

ces êtres qui s'agitent et s'opposent aux ténèbres d'un

sommeil vagabond ?

Et monté sur le dos d'un vivant sortilège, dans la nuit infernale,

nous chevauchons des songes chamarrés de couleurs, de lumières

et de tons plus vifs que n'en produisent les étoiles et les lunes.

Lâchant la bride du cou des chimères que le jour s'emploie à contenir,

elles reviennent en nombre emportant nos esprits dans une course

sans frein affranchie des jalons que l'attention dispose. Les bornes

de nos pouvoirs et les mesures du temps s'ouvrent sur un espace

propre aux seuls sentiments initiés par nos sens.

L'effroi conduit la danse, jalonné des désirs dont les balances vertueuses

maintiennent à l'équilibre le fléau du non-sens.

L'espace d'un instant, les songes débarrassés de leurs habits de

fêtes hennissent à tue-tête mettant fin à la ronde des choses déliées

d'un carcan de silence.

Machinal silence