Les hérons
Les brouillards souvent ont des lenteurs pareilles aux ailes des hérons ;
vagues, légers et lents ils passent avec silence, s'attardant sur les eaux
froides et noires des étangs.
Ils viennent des espaces vides et nus des marais, poussés des vents du soir
et s'abîment et se posent en lisière des forêts où l'arbre veilleur muet fait
obstacle à leur course...
Les rameaux compliqués agissent comme un filet qui piège plumes et doigts
de ces êtres sans contours portés par les courants et les flux du noroît.
Et au matin on trouve ces dépouilles bléssées, immobiles et dolentes figées
dans les ramures dressées face au marais, que le jour rend plus blêmes, plus
transparentes et lasses.
Combien sont-ils ainsi, ces oripeaux de songe et ces oiseaux pêcheurs à finir
leur vie dans l'épouvante d'une nuit qui se voulait propice à l'expansion du rêve?
Nul ne le sait vraiment, tant ces vagues pâleurs s'évanouissent aux yeux en
allant se confondre aux espaces insensés ouverts sur l'azur.