sourds remuements
Une nuit, folle comme une tombe,noire comme l'âme d'un poisson,
plombe tout l'océan qui miroite et qui luit sous le fil incurvé de l'astre
livide et fin, auquel une myriade de gouttes argentées prête une lueur
sans feu, une pâleur sans rayon.
Ainsi qu'un corps rongé par cette vie céleste, la mer remue sans cesse
harcelée par les dents de ces êtres lointains et de l'arc acéré comme une
faux et qui semble, à chaque éclat de lame blanchissant la surface, ôter un
peu de chair au visqueux élément.
L'abîme souffre et se creuse de vagues noires tirées par des courants secrets
vers les fonds ignorés. Le flux se crête d'ombres qui avancent par bonds gagnant
sur le rivage dans le charivari de leurs rouleaux livides. Le ciel ronge la mer et
l'océan aussi dévore tour à tour, le sable de la grève endormie sous les nues.
Au de là de la dune, les feux de quelque ville semblent veiller nuitamment sur
le sort des hommes emportés par des songes avides et clandestins.