Sur le bord du ravin
Sous le regard turpide de la divinité toujours à condamner et toujours à bannir, l'homme
trace son chemin avec la conscience d'une saine
humilité et la soif incessante d'asseoir ses
instincts sur le siège le plus haut parmi la meute humaine qui grogne à ses pieds.
Mais quel est ce pouvoir plus cruel que la force, plus aveugle que l'argent ?
C'est en soi qu'on le trouve et c'est dans le sommeil qu'on en recouvre le règne...!
C'est vers l'autre qu'on l'éprouve et c'est chez un pareil qu'on en savoure la joie …!
C'est au nombre qu'on l'approuve et c'est dans le réveil d'une neuve fantaisie qu'on en goûte
l'amer poison d'inanité...!
Sous l'empire d'un tyran plus fantasque que le rêve et plus féroce qu'un fauve, l'esprit s'attaque
au cœur brûlant de l'existence blessée : peau de chagrin sans cesse rétrécissant le temps offert à
son loisir...Et le corps à son
tour se penche et se plie vers la terre qui l'appelle pour mieux s'en
emparer
et pour mieux y confondre ses substances corruptibles.
Nous sommes des rêveurs emportés dans un songe qui toujours se répète et ne finit jamais. Images
gravées en creux dans le fond de nos crânes et pour lesquelles nous sommes prêts à mourir demain..
.Ainsi que des aveugles sur le bord d'un ravin entraînés par un fou qui ne sait rien du temps,
de la peur ni du mal.