Neige
Jour sans clarté et nuit sans ombre qu'un ciel empli de nuées sombres, prélude de ternes
météores teignant d'un habit de céruse la chair des monts et des forêts, les vallons où sinue
l'eau noire et la peau nue des blancs rivages...
Le corps alangui du pays enseveli sous une neige de cristaux ténus et ardents
comme les arêtes d'une étoile, brûle d'un feu froid et luisant.
Par endroits l'œil d'un étang qu'une taie vitreuse rend aveugle, jette vers le ciel
son regard morne implorant en vain un rayon. Des arbres nus comme les os d'une main
sortie de son tombeau invoquent en une sorte de prière, un improbable renouveau.
Et dans ce paysage glabre, semblable à quelque naufragé longtemps battu par les flots,
les oiseaux paraissent des mouches venus ensemencer ce corps d'un baiser funèbre et glacé .
Sous ce linceul froid et gelé la vie reflue aux sources brûlantes de sa genèse oubliée
quand de l'inertie du chaos surgit le feu et surgit l'eau.