amnésie
Tel un oued asséché par la saison brûlante,
(ou le lit d'un torrent que les glaces absentes n'alimentent plus jamais)
Mon cœur est semblable à ce sable et ce désordre de rochers et cette empreinte
évanescente que colonisent fleurs et plantes.
Les habitants de l'onde ont quitté ce sentier, déserté ces méandres ou sont morts
assoiffés, asséchés par les vents, percés par les traits d'un soleil inflexible.
En songe je vois encore ces étendues paisibles où de grands oiseaux roses, la grenouille,
le mouron venaient boire et goûter la paix de mes rivages et la fraîcheur des ombres
des roseaux et des saules.
Aux azimuts de mon cours ne passent plus désormais que de très hauts nuages sans promesse
d'ondée, même les migrateurs volent maintenant sans descendre en ces lieux où certains
jadis firent sur mes rives, leurs primes apprentissages.
Bientôt cette vague empreinte sinuant parmi les sables (ou tranchée au versant
d'une abrupte montagne) ne sera plus connue des bêtes et des hommes dont la mémoire aussi
appelle à disparaître ces sillons et ces traces qui hier l'enchantaient.