Le songe
Plongé en un profond sommeil peuplé de rêves de
grandeurs, il songe à cette belle endormie
qu'un enchantement prive de souffle, de sens, de
désirs, de passions...
Il songe à ses châteaux aux couloirs qu'hantent
spectres et fantômes comme aux sentiers de la mémoire
qu'arpentent masques et figures.
Il songe à ses domaines, à ses prairies et à
ses breuils que parcourent lièvres et sangliers aux halliers
des loges du sommeil.
Il songe aux oiseaux, aux ciels d'été, aux ciels
d'automne et s'abandonne à l'utopie qu'un jour
il pourra faire du vol le propre de son seul transport.
Il ignore que ses propres ailes sont celles
du sommeil et du rêve et qu'unegravité coutumière le
rive à ses doux oreillers.
Il songe à des voyages sans fin, aux fleuves qui
conduisent à la mer, à ces oiseaux, à ces poissons
dont rien n'arrête la migration. Mais son rivage n'a
d'horizon que le jour qu'un soleil bientôt fera naître
sous ses paupières, ses océans n'ont de jalons que
ceux profonds de ses grands yeux.
S'il ne voit d'issue qu'en lui-même, c'est que
son rêve est exclusif du moindre rival à sa grâce et
que sa belle est endormie en une rêve d'un millier d'années.
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